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La Haine de Mathieu Kassovitz

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il y a 16 ans 1 jour - il y a 15 ans 11 mois #28460 par Phoebe
Un film que j'ai pris plaisir à revoir dernièrement, La Haine, qui reste d'actualité bien qu'il date de 95.
Je constate qu'il y a quelques cinéphiles parmi vous, tant mieux car j'aime parler cinoche en analysant les films.

Là, j'ai tout simplement envie de donner ma propre vision, je n'édicte aucune vérité, je n'en fais qu'un simple constat. J’ai également un peu fouiné sur la toile pour étayer mes arguments et j’ai carrément repris du plaisir à repérer les points esthétiques, mais aussi le scénario qui est une vraie merveille !

Voix off d’Hubert (Hubert Koundé) : C’est l’histoire d’un homme qui tombe d’un immeuble de 50 étages.
Le mec, au fur et à mesure de sa chute, il s’répète sans cesse, pour se rassurer…
Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien… jusqu’ici tout va bien.
Mais l’important c’est pas la chute, c’est l’atterrissage !


Ces quelques phrases résonnent tel un leitmotiv, un genre de fil conducteur du film.
Quelle sera la finalité de cette journée de galère qu’ont subit Hubert, Vinz et Saïd ?
Journée ponctuée par des « intertitres » indiquant l’heure de l’action. L’unité de temps est importante, car elle est l' élément dramatique du film. L’heure avance, le suspense grandit, que va-t-il finalement se passer ? Très bon scénario au passage…

Un bande son signée par Assassin, les compères de Kassovitz qui avaient d’ailleurs déjà participé sur la BO de Métisse.

Réalité ou fiction, le film est troublant car les prénoms des principaux personnages sont identiques à ceux des acteurs, ce qui connote une légère incursion dans le style dit « documentaire ». Réalité fictive ou fiction réaliste, pour moi la question ne se pose pas. Tel Ken Loach, Kassovitz a su se positionner en observateur, peut-être même, tel un anthropologue, analysant les différents portraits de « jeunes de banlieues » (expression devenue très péjorative de nos jours) et du comportement policier, et plus généralement d’une vision de la société pas toujours rose. Observateur averti, Kassovitz n’est pas issu de « la cité » mais a su retranscrire le malaise qui y règne, avec force et réserve, c’est ce qui a mon sens est très appréciable dans ce film.

Le générique débute sur des manifestations et autres émeutes avec pour bande sonore du Reggae (Bob Marley in da place !), contrepoint musical, accentuant la force symbolique des images, nous ne sommes plus dans un climat de paix et Kassovitz l’annonce dès le début, quant bien même la musique radoucirait les mœurs.
Fin du générique, on entend la voix d’une journaliste relatant les émeutes et la raison de ces mêmes émeutes.
Car les médias tiennent un grand rôle dans la manière d’informer les gens sur ce qu’il se passe dans les banlieues. Le but étant en général, d’effrayer et d’insuffler un sentiment d’insécurité dans l’inconscient collectif afin porter le regard sur une catégorie de personnes déjà mise en ghetto.
Au lieu d’essayer de résoudre le problème, on inverse la tendance en pointant du doigt les mauvais bougres, plutôt que de se demander pourquoi les gens sont fous de rage et ont la haine. Car c’est aussi de cela qu’il s’agit.
Les médias, ceux qu'on a l’habitude d’appeler, « le 4ème pouvoir », a le don de diriger/manipuler les esprits… Et c’est un très grand pouvoir !

On entend le tic-tac d’une montre, travelling avant sur Saïd, puis soudain, on entend un coup de feu… Effet d’annonce, la tension montera jusqu’à son paroxysme, jusqu’à la fin du film.
Le ton est donné, un car de crs en faction devant le personnage, recherchant un mineur ayant commis un vol. Saïd taggue son nom ainsi que « baise la police », montre très bien qu’il y a deux camps, mais non déterminés, ce qui prouve que Kassovitz a voulu éviter un certain manichéisme à l’américaine et je ne lui en suis que reconnaissante.
Petit clin d’œil au passage aux Inconnus avec leur sketche de «Oh Manu, tu descends ?! »

Un petit coup d’œil dans la séquence où l’on découvre le personnage de Vinz.
Un personnage à fleur de peau, joué avec justesse par Vincent Cassel, avec cette scène mythique devant le miroir. Ici, on constate tout de suite l’influence esthétique de Mista Kassovitz. En effet, il nous cite le nom moins mythique Taxi Driver (1976) de Martin Scorsese, où Al Pacino se parle devant un miroir. Je pense que ce n’est pas anodin et connote de la part du réalisateur une grande maîtrise du scénario et un don pour raconter les histoires.
Néanmoins, je dois souligner qu’il y a également une autre influence, qui indique un goût prononcé pour le suspense et que Kassovitz souligne discrètement tout au long de son film.
Très judicieux, très raffiné même !
Vinz est souvent filmé à travers son miroir, on voit régulièrement son reflet…
Alfred Hitchcock, maître ès crime, docteur suspense en personne, avait un goût prononcé pour le symbolisme. Dans Psychose (1960), il y a une séquence clé, un détail mais qui a son importance. Quand le personnage de Marion Crane (qui a dérobé une forte somme d’argent à son patron et qui est en fuite), se retrouve dans sa chambre d’hôtel (où Norman Bates l’a accueilli pour la nuit), elle se regarde dans le miroir. Pour ceux qui ont vu Psycho, vous savez tous ce qu’il advient de la jeune femme quand la douche fut prise…
L’annonce de la mort de Vinz est faite dès les premières séquences, fait que l’on pourra vérifier à la fin, car Vinz est souvent vu à travers le miroir, on ne voit souvent que son reflet, effet d’annonce sur sa mort future.
La force du film tient également dans son montage qui rythme la journée des trois amis.
Plus la journée avance, plus l’étau se resserre, plus les plans se font rapides. Le summum du film, la dernière minutes, 6h01 du matin, le point culminant où la tension se fait sentir, devient concrète, presque palpable est admirablement bien amenée.
La boucle est bouclée, au spectateur d’imaginer la suite… peut-être l’objet d’une éventuelle réflexion.

Le fait que le film soit en noir et blanc a son importance. Il exprime pour moi le passé. Quand je prends des photos en N&B, je suis dans mon présent qui exprimera plus tard mon passé.
Le film La Haine exprime un passé mais également un futur qui devient notre présent, car 18 ans après le film n’a pas pris une seule ride !

Dans son analyse du film, Frédéric Das, dit de La Haine que ce n’est pas simplement un classique du cinéma français mais un film culte. Pourtant, le projet au départ a été difficilement accepté par la production.
Un film culte est un film qui est sorti à un moment donné de son objet strict de film, pour devenir quelque chose d’autre. Ce film est devenu un objet social, un objet médiatique, qui va créer très vite un phénomène de mode. Tout le monde en parle, ce qui engendre très vite des malentendus autour du film. La Haine fait partie de ces films basés sur des malentendus.
Un film qui a énormément impressionné le public ainsi que la critique, par sa mise en scène, par son esthétique. Il détonne dans le cinéma français de l’époque par le sujet qu’il traite et sa forme.
Mais avant d’être un film sur la banlieue, F. Das, dit tout simplement que c’est un film sur Paris. Une vision pessimiste sur la ville en général, sur univers urbain.

En relisant certaines récentes critiques du film, force est de constater qu’il reste toujours d’actualité, 18 ans après… Comment se fera l’atterrissage ? Connaissant la cause, quelle conséquence en résultera ?
Autrement dit, quel avenir pour les banlieues françaises ? Va-t-on assister à une totale et définitive mise en ghetto ? Who knows ?!...

Le film se clôture sur la voix off d’Hubert : C’est l’histoire d’une société qui tombe et qui au fur et à mesure de sa chute, se répète sans cesse, pour se rassurer : « Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien. L’important, c’est pas la chute, c’est l’atterrissage. »

Autre analyse : fr.wikipedia.org/wiki/La_Haine
Trailer :



@ voir et à revoir…

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Dernière édition: il y a 15 ans 11 mois par Phoebe.

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il y a 16 ans 1 jour #28462 par ammo
Réponse de ammo sur le sujet Re:La Haine de Mathieu Kassovitz
Yes!Un de mes films préférés,avec un pur bande son (par assassin comme tu l'as bien stipuler)au passage:Rock'n Squatt n'est autre que le frere de Vincent Cassel..
Je rajouterai deux choses:
-Un pur session scratch par Cut Killer.
-et l'apparition de Kassovitz en skin (trés trés bon)

Tu m'as donné envie de le rematter pour une x ieme fois!!!Merci;)

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il y a 16 ans 1 jour #28466 par Phoebe
Réponse de Phoebe sur le sujet Re:La Haine de Mathieu Kassovitz
ammo écrit:

[...]
Tu m'as donné envie de le rematter pour une x ieme fois!!!Merci;)


;)

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il y a 16 ans 1 jour #28473 par dajhne
Réponse de dajhne sur le sujet Re:La Haine de Mathieu Kassovitz
Ca c'est argumenté! Faudra que je le re mâte.... ça fait longtemps. Intéressante l'analogie avec Psychose....

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il y a 15 ans 11 mois #28796 par stereotommy
ammo écrit:

Yes!Un de mes films préférés,avec un pur bande son (par assassin comme tu l'as bien stipuler)au passage:Rock'n Squatt n'est autre que le frere de Vincent Cassel..
Je rajouterai deux choses:
-Un pur session scratch par Cut Killer.
-et l'apparition de Kassovitz en skin (trés trés bon)

Tu m'as donné envie de le rematter pour une x ieme fois!!!Merci;)


Il est passé il y peu de temps sur LCP suivi d'un débat entre Kassovitz et le représentant du principal syndicat de police , c'etait plutôt houleux entre les deux !

Il est plus difficile de briser un préjugé qu'un atome !
Albert Einstein

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il y a 15 ans 11 mois #28807 par grayve
Réponse de grayve sur le sujet Re:La Haine de Mathieu Kassovitz
J'ai largement préféré son film suivant... Assassin.

Qui avait été assassiné par la critique a Canne en son temps ou il avait été présenté en marge du festival.

Heureusement l'acteur principale: Michel Serrault avait défendu le film de kassovitz bec et ongle.

J'ai trouvé le message de ce film plus parlant pour moi petit bourge qui n'a jamais vécu en téci que celui de la Haine que je comprenais mais trouvais beaucoup plus eloigné de ma vision des choses.

:blush:

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il y a 15 ans 11 mois #28824 par Phoebe
Réponse de Phoebe sur le sujet Re:La Haine de Mathieu Kassovitz
grayve écrit:

J'ai largement préféré son film suivant... Assassin.

Qui avait été assassiné par la critique a Canne en son temps ou il avait été présenté en marge du festival.

Heureusement l'acteur principale: Michel Serrault avait défendu le film de kassovitz bec et ongle.

D’ailleurs, son interprétation est excellente dans ce film !

grayve écrit:

J'ai trouvé le message de ce film plus parlant pour moi petit bourge qui n'a jamais vécu en téci que celui de la Haine que je comprenais mais trouvais beaucoup plus eloigné de ma vision des choses.

:blush:

Je pense que tu n’as pas forcément besoin de vivre en cité pour comprendre le phénomène.
Il suffit juste de savoir observer par toi-même et d’éviter d’écouter ce que disent les médias. Quand on vit au cœur de la « téci », on ne s’en rend pas bien compte, normal, pas assez de recul. Kassovitz n’est pas issu de la cité, il a donc eu, à mon humble avis, un recul suffisant pour exprimer son point de vue. Ce qui fait que le scénar et les personnages ne tombent jamais dans le stéréotype, ni dans le cliché. C’est un film juste par bien des points, qui ne tombe, ni dans l’excès ni dans le minimalisme, c’est en tout cas ce que je pense.

Quant à Assassin, ma foi, il faudrait que je le revoie car ça fait une paye mais j’avais fortement apprécié la performance de Michel Serrault, aux antipodes de son rôle qu’il avait tenu dans la Cage aux folles !

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